Fuyant les hordes arabes
Venues de la lointaine Egypte
Pour violer et piller mes sanctuaires,
Pour m’imposer une foi par le cimeterre,
J’ai traversé le nombre
Et gagné le désert.
Dans les massifs de l’Aïr ou du Hoggar,
Avec moi j’ai apporté mon ombre,
Ma langue et mes tiffinars.
D’abord je me suis enfermé dans les basaltes noirs,
Tours inaccessibles de mon désespoir
Et sentinelles fatiguées d’une armée de dunes.
A l’égal de Siméon le Stylite,
Comme lui sous la lune,
J’ai vécu isolé et perché comme un ermite.
Pour cacher ma honte
J’ai caché mon visage, témoin de ma souffrance,
Je l’ai enveloppé dans les voiles de mon errance.
Ainsi j’ai vécu !
Plus tard, j’ai pris une poignée de sable
Et j’ai ouvert ma main…
Alors j’ai vu la vanité du monde.
Puis j’ai ouvert mon âme avec mes yeux,
Et j’ai vu beaucoup mieux.
Désormais sur mon méhari blanc,
Takuba et lance en avant,
Sous l’œil impassible de fennecs ou chacals faméliques,
Je traque le mouflon ou l’addax
Dans le Ténéré ou les monts Tamgak.
Je me plais à errer et parcourir l’immensité,
A coucher mon ombre sous un éthel,
Saule pleureur des sables
Qui ne pousse qu’en des lieux improbables
Et où la lyre de l’harmattan
Tire des harmonies et des sons surprenants.
Chaque jour, dans le jardin des Hespérides,
J’attends de l’astre du matin qu’il allume sa torche nuptiale.
Déjà j'ai bâti le temple de Cybèle,
L’éhan de peau
Et l’agheli d’afaso
Sont prêts à nous recevoir.
Tin Hinan, lointaine et mythique atlante,
Fille de Poséidon et de la nymphe Klito,
Du lointain Tafilalet tu m’as choisi
Pour créer un nouvel ébawel,
Et avec lui, le peuple Touareg.
Viens ! Je t’attends !